Les premières années scolaires et la dyspraxie visuo-spatiale

Les premières années du primaire sont une étape importante pour apprendre à lire, à écrire et à calculer. Souvent, la dyspraxie visuo-spatiale n’est même pas envisagée pour l’enfant qui était maladroit et qui avait de la difficulté à dessiner et à découper lors de sa maternelle 5 ans. On tente parfois  d’expliquer ces difficultés par une hypothèse de déficience intellectuelle ou des raisons d’ordre psycho-affectives.

Pourquoi? Parce que la dyspraxie visuo-spatiale est méconnue. C’est un trouble invisible qui touche la coordination des mouvements volontaires du corps et principalement celle des yeux au niveau des « gestes du regard ».  Selon les statistiques, 6% de la population sont touchés par la dyspraxie motrice. L’altération, plus ou moins importantes, des gestes du regard se situe  au niveau des mouvements des muscles des yeux permettant les actions suivantes:

  • La fixation visuelle: Saisir par le regard un objet ou une cible pour en obtenir une image sur la rétine de l’oeil qui va être transmise au cerveau. Les recherches démontrent que l’enfant dyspraxique ne peut pas fixer longtemps un stimulus surtout sur une feuille ou un écran. Le regard va se promener et errer.
  • Les saccades visuelles: bouger rapidement les yeux entre deux stimulus en positions stables. Les mouvements de saccade sont utilisés lors de la lecture. Les yeux vont faire des mouvements pour progresser sur la ligne à lire, vont aider à revenir au début de la ligne suivante pour poursuivre la lecture. Ils peuvent aussi revenir un peu en arrière sur la ligne pour comprendre ou corriger ce qui vient d’être regarder.
  • La poursuite visuelle: Fixer une cible en mouvement et maintenir le regard sur la cible de façon fluide pour obtenir une image de qualité sur la rétine. C’est un mouvement oculaire très utile dans certaines activités comme dessiner, suivre un ballon des yeux,…
  • L’exploration visuelle: Parcourir du regard un espace déterminé à la recherche d’un ou de plusieurs informations spécifiques. Ces mouvements d’exploration demandent un contrôle moteur oculaire complexe de fixation et de saccade. Cette capacité est régulièrement sollicitée dans les activités de papier-crayon et des apprentissages scolaires.

Quelles sont les conséquences de la dyspraxie visuo-spatiale durant les premières années de la scolarisation?

Durant les premières années de sa scolarisation, l’enfant ayant une DVS (dyspraxie visuo-spatiale) peut vivre des difficultés plus ou moins importantes dans les activités suivantes:

  • Réussir à se former des images mentales pour illustrer la relation d’un objet par rapport aux autres. En mathématiques, les notions d’unités, dizaines, centaines et milliers seront un défi;
  • Coordonner plusieurs informations sur papier lors de calcul ( alignement des chiffres en colonne, ne pas oublier des informations en promenant les yeux sur la feuille,…)
  • Trouver des éléments dans un schéma, au tableau ou sur des cartons placés sur les murs de la classe.
  • Compter des éléments dans un espace déterminé pour en identifier la totalité;
  • Se retrouver dans un texte ou une page
  • Copier des informations du tableau à la feuille
  • Dessiner des formes géométriques ou lors de l’écriture des lettres en tenant compte des trottoirs du cahier,..

De plus, les maladresses ou difficultés ressortent dans les autres activités de la vie quotidienne. Par exemple:

  • Retrouver un objet spécifique dans son bureau ou son casier
  • Réussir à s’habiller ou se déshabiller seul en mettant ses vêtements dans le bon sens
  • Réussir à lacer ses souliers
  • Réussir à ouvrir des contenants pour manger sa collation ou son dîner

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Que faire pour aider l’enfant DVS dans son quotidien des premières années de scolarisation?

 

Un enseignement avec des moyens compensatoires ainsi que des activités de réadaptation pouvant répondre  aux besoins spécifiques de chaque enfant est nécessaire. La concertation entre les différents professionnels du milieu scolaire et de la santé vont aider l’enfant à vivre du succès dans ses activités quotidiennes et lors des apprentissages scolaires.

Des principes de base sont essentiels pour l’enfant:

  • Fournir des adaptations pertinentes selon les besoins de l’enfant dans ses apprentissages scolaires ( livres, logiciels, outils scolaires);
  • Décortiquer les tâches à effectuer dans une activité pour en faciliter la réussite. Cela va l’aider à mieux exécuter chaque mouvement moteur de façon séquentielle;
  • Lui donner des consignes courtes et claires. Vérifier sa compréhension des étapes de l’activité proposée;
  • Fournir des supports visuels (pictogrammes) pour faciliter la séquence des gestes à poser lors d’une activité complexe;
  • Préparer du matériel adapté pour faciliter les apprentissages (matériel à 3 dimensions pour les mathématiques;  matériel aimanté,…);
  • Épurer l’information visuelle que l’enfant doit consulter;
  • Ne pas promouvoir la copie du tableau à la feuille placée sur le bureau de l’enfant;
  • S’assurer d’un positionnement assis adéquat lorsque l’enfant travaille à son bureau;
  • Accepter que l’enfant n’est pas « paresseux » ou « non attentif » lorsqu’il vit des échecs dans certaines situations.

Faciliter la compréhension de la dyspraxie visuo-spatiale et ses conséquences sur l’enfant font une différence majeure dans sa vie et son développement. Il peut ainsi obtenir du succès à l’école et développer un sentiment d’estime de soi qui le construit un peu à chaque jour de son cheminement dans ses premières années de scolarisation!

 

Françoise Lespérance, ergothérapeute

 

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L’alimentation et les difficultés sensorimotrices

L’alimentation peut être difficile lors de troubles sensorimoteurs chez l’enfant. Dans cet article, nous allons regarder de plus près, les difficultés rencontrées lors de trouble oro-moteur (autour et dans la bouche) chez le jeune enfant. L’objectif est de se familiariser avec les différentes difficultés et d’y apporter quelques pistes de solutions pouvant se mettre en action facilement à domicile.

Hypotonie musculaire

Chez certains enfants, le contrôle moteur général est faible. Cela peut leur prendre plus de temps à maintenir la position assise et commencer à marcher. Cela peut être de l’hypotonie musculaire. Au niveau oro-moteur, le contrôle des mouvements de la langue, de la mâchoire, des lèvres, des joues s’avère difficile.Un des signes est que l’enfant ne maintiendra pas toujours la bouche fermée. Il aura de la difficulté à retirer les aliments de la cuillère ou bien positionner ses lèvres sur la tétine du biberon. Il a souvent une perte salivaire entre les repas car sa bouche demeure ouverte avec des lèvres desséchées.

Mouvements non fonctionnels de la langue

La langue a un grand rôle pour former le bolus ( bol alimentaire). Si elle ne remplit pas bien sa fonction, les aliments se retrouvent dispersés dans la cavité orale, au palais ou dans l’arrière-gorge avant la déglutition. En effet, la langue aide au déplacement des aliments vers le côté de la dentition pour faciliter la mastication. Puis, elle ramène tous les aliments vers le centre pour faire le bolus avec la salive. Par la suite, elle aide à pousser le tout vers l’arrière-gorge pour la déglutition. Lors de difficulté, l’enfant va faire des mouvements avec sa tête pour aider à propulser le bolus vers l’arrière.

Autres problématiques parfois présentes

Il y a beaucoup d’autres difficultés motrices qui peuvent influencer la qualité de l’alimentation de l’enfant. De plus, des malformations des structures orales vont avoir des impacts sur les habiletés orales et motrices tel que la succion et la mastication. Un réflexe de déglutition absent ou retardé peut avoir comme conséquence des aspirations dans les voies respiratoires.

Les désordres alimentaires de nature sensorielle

Il est possible d’observer certains comportements inadéquats au niveau sensori-moteur. Parfois, l’enfant réagit violemment à plusieurs aliments pouvant aller jusqu’au réflexe de vomissement même lorsque les textures sont adéquates. Par exemple, l’enfant est capable de mastiquer un fruit mou comme une banane mais chaque fois qu’il essaie d’en manger, la réaction de vomissement est présent. Ce comportement est présent pour plusieurs aliments sucrés et salés.  C’est possiblement une hypersensibilité tactile. Les transitions entre les purées et les solides ou certaines consistances des aliments sont pas facilement acceptées. Il peut aussi réagir violemment à l’odeur des aliments lorsque ils sont présentés avec la cuillère. Dans ces circonstances, cela devient difficile pour le parent de varier l’alimentation de l’enfant.

À l’inverse, l’enfant hypo-sensible, pourrait conserver des aliments, dans sa bouche, collés au palais ou dans l’arrière-gorge sans avoir la réaction de vomissement. Cela peut représenter un risque d’étouffement ou d’aspiration de nourriture vers les poumons. Il y a aussi perte salivaire hors de la bouche sans que l’enfant en soit conscient. Il peut accumuler une grande quantité d’aliments dans sa bouche. Il peut vouloir prendre de très grosses bouchées. Ou bien, il peut préférer des mets très épicés et des boissons gazeuses.

L’enfant présentant des difficultés sensorimotrices a majoritairement d’autres problématiques sensorielles tactiles telle que la difficulté d’accepter des sensations sur la paume de ses mains (ne veut pas toucher à différentes textures) ou sur la plante des pieds (peut marcher sur la pointe des pieds). Il ne tolère pas les vêtements serrés ou réagit fortement si son bas est mal positionné dans son soulier, etc…

Pistes de solution pour les troubles sensorimoteurs reliées à l’alimentation

Souvent, une intervention globale pour moduler le trouble sensorielle est pertinent. Cela va faciliter une intégration neurologique des différents stimulus reçu par le système tactile(la peau). Le système tactile inclut la zone orale (interne et externe) de la bouche.

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Voici quelques suggestions à mettre en place dépendamment de l’objectif à cibler:

Stimuler la fermeture de la bouche pour éviter la perte de salive ou faciliter la fermeture des lèvres sur la cuillère

  • Avec une débarbouillette douce et sec, faites des mouvements de massage sur le visage de l’enfant en direction des lèvres pendant 20-30 secondes avant les repas. Les mouvements doivent partir: a) du haut des joues pour descendre vers les lèvres, b) du menton pour se rendre aux lèvres et c) de la base du nez vers les lèvres. La pression exercée dans le massage doit être agréable à l’enfant. Le mouvement peut être modéré à plus rapide. Si l’enfant préfère un rythme plus lent, ajustez les mouvements. Toujours faire les deux côtés du visage de façon similaire.
  • Si l’enfant refuse que vous lui touchiez le visage, débutez par un jeu où l’enfant reçoit la débarbouillette dans le visage (ex.:jouer à la cachette) puis allez vers les mouvements mentionnés précédemment.
  • Avec votre index et majeur, touchez l’enfant dans la zone autour de la bouche dans un mouvement continue ayant une pression modérée. Le mouvement doit se faire toujours en direction des lèvres. Par exemple, débutez en partant sous le nez et arrêtez lorsque vous toucher les lèvres. Le mouvement de pression faite avec les doigts doivent faciliter la fermeture des lèvres. De faire cet exercice dans les minutes précédents le repas aide les muscles et le système sensoriel à se préparer à fermer les lèvres lorsque se présentera la cuillère.

Fournir une stimulation sensorielle aux gencives pour faciliter la modulation de l’information et obtenir des réponses adaptés aux aliments

  • En utilisant une brosse douce pour enfant ou votre index, frottez doucement les gencives (au-dessus et en-dessous des dents) en appliquant une pression moyenne. Débutez au milieu de la bouche vers un mouvement vers l’arrière de la bouche.
  • Si l’enfant refus cet exercice, utilisez une bosse électrique pour lui masser les gencives

Stimuler les mouvements de la langue pour obtenir la production du bolus lors de l’alimentation

  • En utilisant la brosse en dent douce pour enfant, faites des mouvements de pression sur le milieu de la langue pour que celle-ci forme un « U ». Maintenir pendant 2-3 secondes avant de relâcher.
  • Allez toucher l’intérieur des joues et demandez à l’enfant de venir toucher avec sa langue (s’il peut comprendre la consigne)

Ces suggestions ne remplacent pas une évaluation faite par un professionnel de la santé pour établir un plan d’intervention individualisé pour un enfant. N’hésitez pas à consulter un ergothérapeute de votre région pour recevoir un soutien personnalisé.

Françoise Lespérance, ergothérapeute de Jouer et Grandir

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